Faire durer ses objets, une pratique distinctive ? Consommation et frontières de classe chez les ménages aisés

Enquêtes
Par Maël Ginsburger, Julie Madon
Français

La consommation de biens et services ostentatoires a été largement étudiée en lien avec les dynamiques d’affirmation statutaire des classes supérieures. Pour autant, les pratiques de consommation ordinaire sont également propices à l’affirmation de frontières de classe et à la mise en évidence de mécanismes complexes de distinction sociale. Cet article se propose précisément d’étudier la manière dont des pratiques visant à allonger la durée de vie des biens durables participent, au sein de ménages aisés, de formes renouvelées de distinction sociale vis-à-vis des autres ménages (issus des classes populaires, mais aussi des classes supérieures). Nous mobilisons la notion de « frontières symboliques » de Michèle Lamont, afin d’étudier l’interaction entre plusieurs répertoires distinctifs inégalement mobilisés par les individus concernés. À travers l’exploitation d’enquêtes statistiques et d’entretiens, nous montrons que les pratiques d’allongement de la durée de vie des objets demeurent associées – statistiquement ainsi que dans les représentations – à des situations de forte contrainte budgétaire. Nous montrons alors comment la présence de telles pratiques chez des ménages aisés accompagne un difficile positionnement de leur part le long de la frontière socio-économique. Pour autant, ces pratiques servent de support à l’affirmation de frontières symboliques autres – éthiques, techniques et esthétiques – et participent de la construction d’une identité d’élite anti-consumériste.

  • consommation
  • biens durables
  • classes supérieures
  • frontières symboliques
  • méthodes mixtes
Voir l'article sur Cairn.info