L'effet de légitimité résidentielle : un obstacle à l'interprétation des formes de cohabitation dans les cités hlm

Théories & méthodes
Par Pierre Gilbert
Français

Résumé

Le stigmate résidentiel est au cœur de nombreuses analyses des quartiers populaires. Pour certains, il serait le principal moteur des rapports sociaux, provoquant méfiance, conflits et repli sur la sphère privée. L’interprétation des effets de la mauvaise réputation résidentielle achoppe pourtant sur une difficulté empirique : la situation d’enquête, qui impose le stigmate à l’enquêté et risque de le discréditer, le conduit à afficher face à l’enquêteur une distance à l’égard du voisinage. Les recherches sur les cités produisent ainsi un « effet de légitimité », à l’origine de nombreux décalages entre le discours des enquêtés et leurs pratiques effectives. Pour affronter ce problème, la sociologie interactionniste et la sociologie de l’espace social et de la domination offrent des outils précieux. Mobilisées lors d’une enquête dans un quartier populaire, elles permettent non seulement de mettre au jour cet effet, mais également d’employer plusieurs « ficelles » pour éviter les écueils qu’il engendre : d’une part, considérer les réactions observées en entretien comme représentatives des attitudes des habitants face aux allochtones ; d’autre part, pour décrire les relations entre autochtones, accorder une attention prioritaire aux pratiques, dans la conduite des entretiens comme dans l’interprétation. Loin de l’idée selon laquelle le stigmate produit de l’isolement social, une analyse attentive aux conditions de la recherche fait ainsi apparaître des représentations du quartier nuancées et des pratiques résidentielles plutôt foisonnantes.

Mots-clés

  • cités hlm
  • stigmate
  • classes populaires
  • enquête
  • entretien
  • méthodologie
  • épistémologie
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